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Mathieu Bock-Côté propose un décryptage de l’actualité des deux côtés de l’Atlantique dans #FaceABockCote

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00:00 Quasiment 19h sur CNews, merci d'être avec nous pour Face à Mathieu Bocoté, cher Mathieu, bonsoir.
00:07 Bonsoir.
00:08 Bonsoir Arthur de Vatrigan, comment allez-vous ? Merci.
00:11 C'est sympa parce que je l'ai en main, l'incorrect.
00:14 Ça va vous plaire.
00:15 Alors écoutez, j'espère. Le point sur l'information c'est avec Sandra Tchiambo. Bonsoir Sandra.
00:20 Bonsoir Elliot, bonsoir à tous.
00:23 Parmi les temps forts de l'actualité ce samedi, cette déclaration de Bruno Le Maire, il n'y aura pas d'augmentation d'impôt en 2025.
00:29 Il l'affirme à nouveau. Le ministre de l'Economie et des Finances s'est exprimé suite à la déclaration, à la dégradation de la note souveraine de la France par l'agence Standard & Poor's.
00:37 Il souligne la nécessité de réduire les dépenses publiques. Il étudie toutes les options pour établir les finances en 2027.
00:44 Nouvelle journée de mobilisation à Paris. Un rassemblement pro-palestinien s'est tenu ce samedi.
00:49 Il s'était lancé en début d'après-midi de la place de la République.
00:52 Plus de 22 000 personnes ont défilé selon la police. Parmi elles, des manifestants antifascistes et des partisans des indépendantistes de Nouvelle-Calédonie.
01:00 Quelques incidents ont été signalés.
01:03 Et puis, Rafa, sous les bombardements, après la présentation d'un plan israélien de cesser le feu, l'armée israélienne poursuit son offensive ce samedi.
01:11 Des frappes aériennes et des tirs d'artillerie intenses ont visé cette ville frontalière avec l'Égypte.
01:15 Les opérations se concentrent en particulier à l'ouest. Au moins 95 Palestiniens sont décédés en 24 heures.
01:22 Merci Sandra pour le point sur l'information.
01:24 A la une de face à Mathieu Bocoté, le chancelier Olaf Scholz a qualifié l'attaque d'attentat.
01:30 Vendredi, un homme armé d'un couteau s'est jeté sur plusieurs personnes, faisant six blessés avant d'être neutralisé.
01:36 Depuis 24 heures, on n'entend plus parler du profil d'une des victimes, un activiste d'extrême droite, que du meurtrier.
01:43 Alors pourquoi et de quoi ce drame est-il le nom ? On en parle dans un instant.
01:48 Au programme également, un centre d'accueil de migrants est au cœur de la polémique dans le 16e arrondissement.
01:52 Les habitants sont contre et se mobilisent, soutenus par l'Église, les Républicains.
01:57 Mais ils ne sont pas entendus par la maire de Paris.
02:01 Si la crise migratoire ne fait que commencer, ces mobilisations citoyennes sont-elles amenées à se répéter ?
02:06 Élément de réponse dans cette émission. Enfin, cher Mathieu, vous recevez ce samedi un immortel.
02:11 Mauricio Serra, membre de l'Académie française depuis 2010.
02:15 Il vient de publier "Munich 1938, la paix impossible" aux éditions Périn.
02:21 Esprit munitrois, es-tu là ? On se posera la question.
02:25 Voilà le programme face à Mathieu Beaucote. C'est parti.
02:40 - Cher Mathieu, partons en Allemagne. À Mannheim, l'islamisme vient de frapper.
02:45 Un Afghan de 25 ans s'en est pris à des militants identitaires, s'opposant à l'islamisation de leur pays.
02:51 Cette scène arrive dans un contexte très particulier en Allemagne.
02:55 Et c'est sur ces événements que vous souhaitez revenir pour votre première édition.
02:59 - Oui, parce qu'on est vraiment... Alors je reviens sur cet événement à cause en bonne partie du traitement médiatique qu'on y a réservé.
03:07 En fait, depuis 24 heures, il y a quelque chose là-dedans, c'est comme un révélateur absolu
03:12 du grand écart entre le réel et sa falsification par les médias.
03:17 Presque falsification à ce niveau qui relève du mensonge programmé.
03:21 C'est même pas une falsification par biais idéologique.
03:24 C'est qu'on est devant une forme de détournement du réel.
03:27 Alors qu'est-ce qu'on voit ? Je rappelle les événements.
03:29 Et ensuite, il y a plusieurs couches d'événements à raconter.
03:32 Le premier événement, c'est un stand du mouvement Pax Europa,
03:36 qui est un mouvement que les médias classent inévitablement, dirais-je, à l'extrême droite.
03:41 Vous connaissez ma phrase, tout le monde a, était, est ou sera un jour accusé d'être d'extrême droite.
03:45 Surtout si vous luttez contre l'islamisation.
03:47 Donc un stand est organisé, en fait une série de stands, et il y a un militant qui est présent.
03:54 Or qu'est-ce qu'on voit ? On voit clairement identifiable, c'est en passant.
03:58 Et là, il y a un islamiste qui se présente et qui poignarde, c'est le moins qu'on peut se dire,
04:03 il poignarde plusieurs personnes d'ailleurs. Et la scène est filmée, je prends la peine de le dire.
04:08 La scène est filmée, les policiers interviennent.
04:10 Or les policiers, lorsqu'ils interviennent, qu'est-ce qu'ils font d'abord ?
04:14 Ils s'en prennent à la victime plutôt qu'à l'agresseur.
04:17 C'est-à-dire que dans leur esprit, conditionné à l'idée que le mal,
04:22 c'est toujours ce qu'ils appellent l'extrême droite, ils s'en prennent,
04:25 ils vont se corriger très rapidement, mais la première personne auquel ils s'en prennent,
04:28 c'est à la victime. Et là, hop, finalement, ils se trompent.
04:30 D'ailleurs, je précise que le policier lui-même a été agressé, a été poignardé,
04:34 ce n'est pas un détail. Donc, on est dans une scène, ça nous dit quelque chose,
04:39 parce que je vais faire le lien avec le récit médiatique ensuite, dans l'esprit des policiers,
04:43 c'est pas que les policiers sont bêtes, c'est qu'ils ont été conditionnés à l'idée que l'ennemi a un visage,
04:48 et ils ont tout de suite repéré le visage, en disant « c'est l'extrême droite, l'extrême droite coupable ».
04:52 Alors, comment cet événement nous est-il raconté médiatiquement depuis à peu près 24 heures ?
04:57 On fait toujours le même récit, des violences ont lieu dans un événement d'extrême droite en Allemagne.
05:05 Alors, on dit « ok, d'accord », mais là, on fait le portrait du poignardé,
05:10 le portrait de la cible, en disant « mais c'est un homme dangereux, d'ailleurs,
05:14 il a été surveillé par les différents offices de protection de la Constitution,
05:19 c'est un individu qui était idéologiquement suspect », et on cherche désespérément,
05:24 dans les articles, la trace du mot « islamiste ».
05:28 Donc, on n'est pas loin de nous expliquer, en fait, que dans ce récit, l'élément central,
05:33 c'est que des gens dits d'extrême droite ont été agressés, mais ils ont été agressés,
05:39 est-ce qu'ils ne l'ont pas un peu cherché avec les idées qui sont les leurs ?
05:43 D'ailleurs, d'ailleurs, et ça, ça va encore plus loin,
05:47 lorsqu'on décide d'intégrer la variable « islamiste » dans le récit des événements,
05:53 alors on nous ressort la théorie usée de la tenaille identitaire que l'on connaissait en France pendant le temps,
05:59 en disant « ah, bien, en fait, ce sont l'extrême droite et les islamistes qui se sont rencontrés,
06:05 qui se sont tabassés, il y a eu une rixe entre extrémistes ».
06:08 Je note, soit dit en passant, que le président du syndicat de la police, en Allemagne,
06:14 estimait que cette attaque contre le stand anti-islamisation
06:17 était un heurt, un choc entre différents extrémistes.
06:21 Donc, il faut bien comprendre qu'il y a d'un côté des gens qui protestent démocratiquement,
06:25 de l'autre côté des gens avec un couteau, et finalement, on met dans la même catégorie ces gens
06:31 sur le mode « ils devaient inévitablement se rencontrer sur le mode le plus violent ».
06:36 Ce qui est fascinant dans cette agression islamiste contre un stand de militants anti-islamisation en Allemagne,
06:42 il faut simplement le redire, en décrivant les choses telles qu'elles se sont passées,
06:46 c'est que ça arrive au terme d'une semaine politique en Allemagne où le récit était tout autre.
06:52 Au terme, j'y reviendrai un peu plus loin, mais quel était le récit d'une semaine ?
06:56 Vous avez probablement vu passer cette scène d'une jeune fille dans une fête,
07:00 d'une bonne bourgeoisie allemande qui font des chants qui sont par ailleurs tout à fait condamnables,
07:04 l'Allemagne aux Allemands, l'immigration d'ordre.
07:07 Il ne s'agit pas de défendre ça, mais il s'agit de rappeler que c'est une chanson.
07:11 Et pendant une semaine, l'ensemble de la classe politique allemande s'est mobilisé en disant
07:15 « mais c'est absolument terrible, regardez la chanson, regardez la menace qui pointe,
07:21 regardez la menace qui est devant nous, c'est le retour, même pas des casques à pointes,
07:25 ça c'est la première guerre mondiale, c'est le retour potentiel des nazis. »
07:29 Donc ça c'est le discours pendant une semaine, d'ailleurs ça a presque fait le tour du monde.
07:33 Depuis une semaine, donc c'est assez étonnant, la mise en scène d'un récit médiatique qui nous dit
07:41 « voyez le véritable danger, il est là, d'autant avec la menace d'élection européenne, l'AFD. »
07:45 Et là qu'est-ce qu'on voit en l'espace d'une semaine en fait, cet événement que je viens de vous raconter.
07:50 Et aussi à Hambourg, ne l'oublions pas, la marche pour le califat organisée par des islamistes en Allemagne.
07:57 Une marche ouverte pour le califat organisée en Allemagne.
08:01 Donc vous avez cette espèce de grand écart, ce grand écart entre deux côtés.
08:06 Un discours qui ne cesse de laisser croire, de soutenir que le véritable danger c'est le retour des nazis, des fascistes,
08:14 c'est l'émergence de l'extrême droite et on intègre désormais dans la définition de l'extrême droite le refus de l'islamisation de son pays.
08:20 Et là quand le réel frappe, le réel frappe qu'est-ce que c'est?
08:24 Et bien c'est une marche pour le califat à Hambourg, c'est un islamiste qui poignarde les militants anti-islamisation
08:31 et par ailleurs c'est un récit médiatique qui recouvre le tout pour expliquer que finalement les vrais coupables demeurent les agresser.
08:38 Un dernier point là-dessus, ça me fait penser par ailleurs, rappelez-vous, au moment de l'assassinat de Dominique Bernard,
08:45 la semaine d'avant on nous expliquait que les enseignants craignaient terriblement dans certains journaux,
08:49 on nous expliquait que les enseignants craignaient ce mouvement inquiétant qui était "Parents Vigilants",
08:54 le mouvement de parents mobilisés autour de Reconquête qui dénonce la présence du wokisme à l'école
09:00 mais au terme d'une semaine ou deux semaines finalement c'est l'islamisme qui encore une fois avait frappé.
09:05 Donc encore une fois, comme en France on dénonce sans cesse le racisme supposé de la société française,
09:09 mais au final c'est Crépole, au final c'est Murinet, au final c'est le racisme anti-blanc qui frappe.
09:14 Donc comme quoi il y a les événements, il y a le recouvrement médiatique et il y a le retour au réel.
09:20 Sur l'intervention des policiers Mathieu, pardonnez-moi mais on a eu quelques spécialistes ce matin
09:24 qui disaient qu'il était possible qu'il y ait eu une confusion au moment de l'intervention.
09:28 - Oui, je suis bien entendu mais ça ne m'a pas convaincu du tout.
09:30 Non, non, non, j'ai bien entendu les... je pense que pour l'instant on est sur le mode du réflexe d'autodéfense corporatiste.
09:36 Dans un pays qui conditionne sans cesse sa population à dire "voilà les vrais méchants",
09:40 je pense que dans la tête du policier le vrai méchant ne pouvait avoir qu'un visage.
09:44 - Vous veniez de le dire et d'en parler, c'est de toute autre chose que l'Allemagne s'inquiétait depuis quelques jours Mathieu Bocoté.
09:51 - Alors j'y reviens, c'était le fameux chant, on nous dit "c'est terrible, la jeunesse allemande s'oppose à l'immigration massive",
09:57 c'est-à-dire qu'on est dans des chants qui sont à la fois extrémistes et festifs.
10:00 Je le redis, je le redis, c'est évidemment condamnable comme chant dont on a parlé.
10:04 Mais l'enjeu c'est que le régime en fait, et je reviendrai dans un instant,
10:08 est conditionné à l'idée qu'il ne peut y avoir qu'un péril existentiel, c'est la fameuse extrême droite.
10:14 Et aucun malheur qui peut frapper un pays n'est plus grand que l'extrême droite, que ce malheur pourrait favoriser.
10:21 C'est le fameux faire le jeu.
10:23 - Et il y a un point par ailleurs, donc il y a les élections européennes dans une semaine environ, un peu plus d'une semaine,
10:27 il y a la montée de l'AfD en Allemagne.
10:29 Alors l'AfD qui est un parti, c'est particulier, vu l'histoire allemande, c'est évidemment un parti qui est contaminé par des scories,
10:35 qui est un parti qui est contaminé par la part la plus toxique de l'histoire allemande, qui dira le contraire.
10:40 D'ailleurs Marine Le Pen a rompu avec ce parti tout récemment.
10:43 Mais réduire l'AfD comme phénomène sociopolitique à une résurgence du nazisme, c'est très très court.
10:51 L'AfD émerge d'abord comme un parti de lutte contre l'immigration massive et contre l'islamisation de l'Allemagne.
10:58 Donc effacer du logiciel politique le phénomène AFD = protestation contre l'islamisation et le basculement démographique de l'Allemagne,
11:08 c'est-à-dire ça ne compte pas.
11:10 Ça ne compte pas parce qu'il y a par ailleurs de vrais éléments toxiques dans ce parti, je trouve ça assez rapide.
11:14 On nous parle, c'est un parti qui est sous surveillance aujourd'hui de l'Office de protection de la Constitution.
11:19 Vous savez ce bureau qui est censé protéger la Constitution en Allemagne contre les extrémismes.
11:23 Mais bien franchement, moi ce bureau que plusieurs ont souhaité abolir au fil de l'histoire,
11:26 ça me fait un peu penser à une Stasi version Allemagne de l'Ouest.
11:30 Et par ailleurs, que s'est-il passé en Allemagne quand même depuis 2015?
11:34 C'est le pays qui a connu, grâce à Angela Merkel, qui à l'échelle de l'histoire sera tenue à mon avis pour une irresponsable terrifiante,
11:40 qui a rendu possible l'arrivée massive des migrants qui a entraîné un bouleversement démographique en Europe.
11:47 C'est un pays qui est victime l'Allemagne aujourd'hui d'une forme de néocolonialisme turc.
11:51 Il ne faut pas le sous-estimer. Erdogan a une politique très explicite pour empêcher l'assimilation des Turcs en Allemagne.
11:58 C'est le pays qui a connu en 2015-2016, en fait rappelez-vous, les agressions de Cologne.
12:02 C'est un pays en 2024 où Francfort a célébré officiellement le Ramadan comme s'il s'agissait d'une fête parmi d'autres.
12:09 Donc c'est un pays qui fait l'expérience de l'islamisation, mais qui à cause de son histoire,
12:14 n'a pas le droit de mobiliser son identité dans l'espace public sans que cette identité ne soit réduite à une résurgence du fascisme.
12:20 Et ça je crois que c'est l'élément central dans tout ça. L'Allemagne, plus encore que la France,
12:24 évidemment l'histoire est tout à fait compréhensible là-dessus, s'est rendue coupable de telles atrocités
12:29 qu'on ne mentionne l'identité allemande que par la négative. Mais bien les Allemands disent aujourd'hui
12:34 qu'il y a l'horreur absolue du nazisme, mais notre identité ne se réduit pas au nazisme,
12:38 et la culture allemande ne se réduit pas au nazisme, donc tout ça est dans l'espace public.
12:42 Je note par ailleurs, et je le disais, qu'on voit le même discours partout en Europe occidentale aujourd'hui.
12:47 Partout, partout, partout. L'enjeu principal c'est l'extrême droite, quelles que soient les circonstances,
12:51 on le voit dans les meetings électoraux ces derniers jours. Donc on nous présente, on nous récapitule encore une fois
12:56 l'histoire du XXe siècle sur le mode du retour du fascisme. On a cessé d'étendre la définition du fascisme
13:01 pour le voir partout. Pour le voir dans la lutte contre l'islamisation, pour le voir dans le féminisme
13:06 qui lutte contre le fait de bâcher les femmes, pour le voir dans la critique de l'idéologie trans-radicale.
13:11 On étend sans cesse la définition du fascisme parce que tout le système est fondé sur ce mythe,
13:15 c'est-à-dire le mythe antifasciste, avec ce problème que le fascisme a été vaincu depuis longtemps.
13:19 Donc on doit sans cesse étendre sa définition pour le combattre. Voilà pourquoi, d'ailleurs,
13:23 au cœur des élections européennes, le grand récit c'est la lutte contre l'extrême droite.
13:27 Je note une dernière petite chose sur cela. Certains ont dit qu'il n'aurait pas fallu montrer ces images.
13:32 Il ne faut pas montrer les images, les vidéos qui ont tourné en Allemagne de l'agression.
13:36 À un moment donné, on commence à comprendre. Le régime ne tolère pas qu'on expose la réalité.
13:41 Donc on nous dit, sous prétexte d'humanisme, il ne faut pas voir. C'est tellement violent,
13:45 c'est tellement... c'est une violence telle qu'on ne doit pas la montrer.
13:48 On ne doit pas montrer des scènes de crime. En fait, on ne doit pas montrer la réalité
13:52 qui vient contredire le récit de la diversité heureuse. Et tout ça aura des conséquences,
13:56 probablement, ailleurs, pour les élections européennes.
13:58 Quiconque est allé en Allemagne ces derniers mois et connaissait l'Allemagne auparavant
14:03 peut voir l'évolution, tout en parlant avec les Allemands, et le paysage allemand qui a complètement changé.
14:09 Arthur de Vatrigan, quel regard portez-vous sur cette attaque ?
14:13 Je le disais, Olaf Scholz parle d'attentat. Et ces 24 dernières heures, on a plus entendu parler
14:19 de l'une des victimes que de la saillante.
14:23 C'est un exemple de plusieurs réussites, des 9 ans de vivre ensemble en Allemagne.
14:27 Mathieu parlait de 2015, où Angela Merkel a en effet ouvert grand les portes de l'Allemagne
14:35 en faisant rentrer un million de demandeurs d'asile.
14:39 Et qu'elle allait être jugée négativement dans l'histoire. Jusqu'à présent, elle est jugée positivement.
14:44 Je rappelle qu'elle a reçu un prix du haut commissaire de l'ONU,
14:48 que la presse allemande, et pas que allemande, française, se félicitaient de, je cite,
14:53 "un acte moral fort, une solidarité inédite".
14:57 Qu'on a même eu, Radio France, notre papesse du pluralisme, qui au bout de 6 ans,
15:01 parle d'un défi colossal qui a été relevé positivement.
15:04 Je confirme, le défi est relevé, relevé haut la main.
15:07 On a eu ces derniers mois, Mathieu l'a rappelé, à Hambourg, une manifestation
15:10 avec des leaders qui disent unir les musulmans dans un califat dirigé par l'Ouah Islamique.
15:15 Il y a eu en début d'année, dans une école à Dusseldorf, une offensive d'élèves
15:19 qui exigeait que les musulmans soient autorisés à quitter l'école plus tôt pour la prière du vendredi
15:24 et que la ségrégation sexuelle dans les cours de notation s'appliquait également aux professeurs,
15:28 avec en cadeau des menaces de représailles sur plusieurs étudiants,
15:32 qui ont pu avoir suivi des consignes, selon le journal Bild,
15:35 se seraient convertis de force à la religion d'amour et de paix.
15:39 À Francfort, deux enseignantes ont interdit à leurs élèves âgés de 10 et 11 ans
15:45 de boire de l'eau en respect pour leurs camarades musulmans.
15:48 24 enfants privés d'eau pour trois jeunes musulmans, c'est beau comme le socialisme,
15:53 on est généreux avec le gozi des autres.
15:55 L'hiver dernier, en Allemagne, le conseil d'administration d'une crèche, la crèche Anne Frank,
16:00 a décidé de renommer l'établissement pour qu'elle soit plus ouverte qu'auparavant.
16:05 Alors, les mauvaises langues diront qu'il y a toujours eu un lien fort entre l'islamisme et l'Histoire,
16:09 et l'Allemagne, historiquement pardon, du moins une certaine période de l'Histoire allemande.
16:14 Le Point nous a prôné qu'il y a quelque temps que le bouquin allemand le plus vendu dans le monde musulman,
16:19 qu'on trouve notamment au Caire, à Damas, à Erbil, au Kurdistan,
16:23 et pas dans une arrière-boutique, vraiment sur les deventures, il s'appelle "Meinkampf".
16:27 En Turquie, pays voisin de l'Allemagne, la réédition en 2005 s'est vendue à plus de 80 000 exemplaires.
16:33 Et quant à l'affiliation des leaders, pas besoin de remonter jusqu'en Groumouti de Jérusalem
16:38 pour trouver des liens entre des chefs musulmans et des papouilles avec Hitler.
16:42 En 2009, l'ex-guide spirituel des frères musulmans, Youssef Al-Qaeda Radawi,
16:47 sur la chaîne Qatari Al-Jazira, avait déclaré, je cite,
16:51 "Tout au long de l'Histoire, Allah a imposé aux Juifs des personnes qui les punissaient de leur corruption.
16:56 Le dernier châtiment a été administré par Hitler."
17:00 On a appris il n'y a pas longtemps dans le Figaro, selon une note des renseignements généraux,
17:05 que le nombre de frères musulmans en France était passé de 50 000 à 100 000 entre 2019 et aujourd'hui.
17:11 Et quand je vois qu'en France, à la suite de cette attaque,
17:15 une courge Colabo déguisant journaliste qui officie notamment sur le Média,
17:20 s'est presque réjouie que le raciste, entre guillemets, soit blessé ou soit mort,
17:26 on se dit que la pénurie d'antipsychotiques en France va être difficile à avaler
17:30 comme prétexte à ce qui va se passer dans les prochaines semaines et les prochains mois.
17:35 Mathieu Beaucoté, un centre de demandeurs d'asile, on va parler de votre second édito à présent,
17:41 vient de s'installer dans le 16e arrondissement de Paris
17:45 et des centaines d'habitants du quartier se mobilisent contre cette décision.
17:49 Et c'est sur cette mobilisation que vous souhaitez revenir pour votre second édito.
17:53 Ah oui, c'est une scène qui est à la fois grave et qui a un côté involontairement comique, pourrais-je dire.
18:00 Involontairement comique parce qu'on voit des gens faire l'expérience désormais d'idées
18:05 qu'ils prescrivaient pour les autres pendant longtemps.
18:09 Alors je ne reviens pas sur le détail, on l'aura compris, c'est dans le cadre d'un pavillon, d'un hôpital.
18:13 Et là, le commun des mortels, dans le 16e, découvre donc l'implantation d'un centre de demandeurs d'asile, de réfugiés,
18:23 selon la logique de la répartition des populations.
18:25 On le sait, donc c'est… à l'origine, c'était dans le cadre des olympiques.
18:29 On disait on va les répartir un peu partout pour déconcentrer l'île de France.
18:34 Donc on va les répartir un peu partout, même si tout le monde fait l'expérience,
18:37 on voit qu'il y a des résistances aussi un peu partout devant cette politique de répartition.
18:42 Premier élément, qui est vécu par plusieurs comme une campagne d'ingénierie sociale.
18:47 Ne pas se tromper, rappelez-vous tout le discours sur le repeuplement des campagnes grâce aux migrants
18:53 qui viendraient donner aux campagnes la jeunesse qui leur manque,
18:57 grâce à ces populations nouvelles qui veulent travailler,
18:59 alors qu'il n'y aurait finalement que des octogénaires et des grabataires dans les campagnes.
19:04 Donc même paysage, c'est pas le même peuple, mais c'est pas grave, apparemment ça va fonctionner.
19:09 On le sait, les populations, globalement, n'en veulent pas.
19:12 N'en veulent pas, faut juste… et c'est pas parce qu'elles sont racistes ou xénophobes,
19:16 c'est parce qu'elles ont fait l'expérience au fil des années, des décennies,
19:21 que ce basculement, dis-je, démographique, entraîne des conséquences réelles,
19:27 notamment l'insécurité. Vous avez vu par ailleurs cette semaine l'incroyable tango,
19:32 en fait, des figures gouvernementales. Est-ce qu'il y a un lien entre l'immigration et l'insécurité?
19:35 Oui, non, peut-être de temps en temps. Et là, ils s'engueulent entre elles, ces figures,
19:40 pour savoir si oui ou non on doit reconnaître ces faits,
19:42 mais si on les reconnaît, ça peut faire le jeu de l'extrême droite,
19:44 donc mieux vaut ne pas les reconnaître sans pour autant les contester.
19:47 Il y a de quoi devenir fou à travers cela.
19:49 Par ailleurs, qu'est-ce qu'on voit? Et c'est une formule, moi, qui m'a beaucoup marqué depuis deux ans.
19:53 Elle n'est pas encore percée médiatiquement, mais elle est courante dans la conversation.
19:58 Des gens parlent de territoires préservés, des territoires préservés.
20:02 Et là, quand j'entends ça, je me dis, mais ce vocabulaire est très fort.
20:05 Autrement dit, il y a des territoires qui sont préservés de l'immigration massive,
20:09 et on entend, et on a vu, par exemple, des maires qui disaient « pas dans mon village,
20:12 pas dans ma ville », et ainsi de suite. Donc, qu'est-ce qu'on entend par là?
20:16 Il y a une forme de communautarisme franco-français qui émerge,
20:20 comme si on renonçait, plusieurs Français renoncent, du peuple historique français,
20:23 renoncent à l'idée que l'ensemble de la France soit désormais de culture française,
20:28 mais veulent préserver des îlots qui ne seront pas transformés par cela.
20:33 Puis je me permets de référer, alors évidemment, je ne donnerai pas de nom,
20:36 parce que je suis un garçon poli, mais depuis que je suis arrivé ici,
20:40 le nombre de personnes que j'ai pu croiser dans le 16e ou ailleurs,
20:43 ce sont des gens bien installés, des gens qui nous feraient tous passer ici,
20:47 pour des gens, en fait, des petits pauvres devant d'immenses fortunes.
20:51 Et j'entends par là des gens qui sont très, très bien installés dans la vie,
20:54 et qui m'expliquaient souvent, au fil des conversations,
20:57 « vous savez Mathieu, le pays est perdu, voilà pourquoi,
21:00 pour l'instant on est préservé dans nos quartiers, mais tout cela viendra,
21:04 donc je prépare mes enfants pour qu'ils puissent vivre ailleurs qu'en France. »
21:09 Combien de fois ai-je entendu dans les lettres ce discours
21:11 qu'il faut préparer la jeune génération pour qu'elle puisse s'exfiltrer,
21:15 les nouveaux émigrés en quelque sorte, qui doivent quitter un pays
21:18 sur lequel ils ne peuvent plus avoir d'emprise.
21:20 Et je leur demandais quelques fois, « mais d'accord, mais alors pour qui votez-vous
21:23 aux élections, si vous êtes à ce point catastrophés par le basculement démographique,
21:26 pour qui votez-vous ? » Le réflexe était normalement, on vote au centre, bien évidemment,
21:30 parce qu'il y avait une conscience chez plusieurs, donc appelons ça le 16e,
21:34 la conscience de classe s'était substituée à la conscience nationale,
21:38 donc il fallait quand même défendre les bons intérêts de la bourgeoisie
21:41 plutôt que défendre l'intérêt national parce que ça pouvait être dangereux,
21:43 sauf que là, désormais, la bonne bourgeoisie est secouée dans ses habitudes quotidiennes
21:47 avec l'arrivée de tout ça. Je note que les médias, notamment Un Quotidien,
21:52 a été très sévère envers la manifestation contre l'installation de ce centre de migrants
21:57 en disant qu'il y avait des slogans très très louches, des drôles de slogans,
22:02 parce qu'apparemment il y avait un lien entre la sécurité et l'immigration qui est l'idée.
22:06 - Est-ce que ces mouvements populaires, Mathieu Boquecôté,
22:08 de résistance à la répartition des migrants risquent de se multiplier, selon vous?
22:14 - Ils se multiplient déjà! Si le 16e se mobilise, dites-vous, on en est rendus.
22:18 C'est-à-dire une mobilisation populaire dans le 16e, je trouve que cette formule a un charme
22:22 tout à fait inattendu. En fait, soyons honnêtes, des nouveaux mouvements existent déjà.
22:26 Pensez à Saint-Brévin, pensez à Réalement, il y a des manifestations qui s'organisent souvent
22:31 contre l'installation d'un centre de demandeurs d'asile. Et par ailleurs, je me rappelle qu'à Réalement,
22:36 si je ne me trompe pas, on a interdit la manifestation parce qu'elle était organisée apparemment
22:41 par des gens qui étaient classés à l'extrême droite. On y revient toujours.
22:44 Ils portaient la sale étiquette, on leur avait collé la sale étiquette,
22:47 ça donnait le droit d'interdire la manifestation, alors qu'il s'agissait d'une manifestation pacifique
22:52 et démocratique. Je note que parmi ces manifestations, il y a aussi ce qu'on appelle le vote populiste,
22:57 qui depuis les années 80, en France et partout en Europe occidentale, s'oppose à ce mouvement
23:03 de basculement démographique qu'on ressent dans sa chair. Je note que ça peut aller plus loin
23:06 de manière tragique. Regardez ce qui se passe en Irlande. Personne ne va légitimer ce qui se passe
23:10 en Irlande, ce sont des manifestations violentes. Mais voyez, lorsque la société s'échauffe
23:14 entre des communautés qui ne parviennent pas à vivre ensemble, voyez ce que cela peut donner.
23:19 On l'a vu, donc, je l'ai dit, en Irlande. Au final, il y a une chose qui me frappe,
23:23 l'immigration massive est la seule conviction fondamentale du régime diversitaire partout en Occident.
23:28 Il peut faire des compromis sur tout, tout, tout, mais sur cela, il en est incapable.
23:32 Ça nous en dit beaucoup sur l'imaginaire de certaines élites qui, devant le choc démographique,
23:37 devant tout ça, vont toujours radicaliser le régime plutôt que l'amender pour tenir compte
23:41 de la voix des peuples.
23:42 Mettons les politiques de côté, Arthur de Patrigan. Pourtant, il n'y a rien de plus consensuel
23:47 que la question migratoire quand on interroge les Français. 7 à 8 Français sur 10
23:52 qui partagent peu ou prou les mêmes opinions. Réduire les flux migratoires,
23:56 protéger nos frontières, etc.
23:58 Oui, mais il y a une différence entre répondre à un sondage quand c'est anonymisé
24:02 et le dire publiquement. Et malheureusement, on sait que la bourgeoisie…
24:07 Si vous voulez régler le problème des Français, vous importez les problèmes
24:11 en bas des appart' cosus des bourgeois. Vous allez gagner quelques années de galère.
24:16 Mais regardez, il y a eu aussi, c'est assez amusant cette semaine, le "tweetgate" des Républicains.
24:21 Sur l'Algérie. Ce qui est assez amusant. Vous venez de dire qu'on est en campagne,
24:25 c'est comme les bourgeons au printemps, le courage débarque comme ça,
24:28 puis une fois les élections passées, c'est comme l'hiver, tout d'un coup ça disparaît.
24:31 Là, je pense que ça va durer un peu plus longtemps. Même si on a vu des réactions,
24:35 notamment Xavier Bertrand, mais bon, ça fait longtemps qu'il s'est fait opérer du courage,
24:38 et d'autres éditorialistes, notamment de la Radio France, qui ont accusé ce tweet de raciste.
24:43 Ce tweet-là de raciste, alors, ça veut dire que, je répète juste ce qu'il y avait écrit,
24:47 c'est "demander l'expulsion de criminels étrangers, de clandestins et d'OQTF".
24:54 Alors, moi je suis désolé de l'avouer, mais si être raciste c'est ça, je crains que je le sois.
24:59 Et je crains que beaucoup de Français le soient, malheureusement.
25:03 Mais je pense que ce n'est pas le cas, je pense qu'en effet que ce n'est pas du racisme,
25:06 je pense que c'est juste du bon sens, du bon sens qui ne doit même pas être populaire,
25:10 c'est le bon sens que tous les Français doivent avoir,
25:12 et je pense qu'en effet, là, il y a quelque chose qui est en train de changer,
25:16 pour la triste raison que tout le monde, plus personne n'échappe à cette délinquance aujourd'hui.
25:21 – Messieurs la publicité, dans un instant vous allez recevoir un immortel,
25:25 c'est un invité exceptionnel. – Auteur d'un livre absolument remarquable.
25:28 – Eh bien, c'est bien pour ça que vous l'invitez, Esprit Muniquoi est-il là ?
25:33 Il est souvent invoqué cet Esprit Muniquoi,
25:35 notamment pendant les grands meetings avec beaucoup de monde.
25:39 Alors, est-ce qu'il y a un écho à cet Esprit Muniquoi de 1938 ?
25:45 On voit tout ça juste après la publicité, à tout de suite.
25:48 Quasiment 19h30 sur CNews, la suite de Face à Mathieu Boquete,
25:56 toujours avec Mathieu bien sûr, et Arthur de Vatrigan,
25:58 et nous recevons ce samedi soir Mauricio Serra, merci d'être avec nous.
26:02 – Merci beaucoup de m'inviter.
26:03 – Vous êtes un historien, écrivain, académicien, membre de l'Académie française,
26:07 vous avez écrit « Munich 1938, la paix impossible ».
26:13 Mathieu Boquete, pourquoi avoir invité ce samedi soir un immortel ?
26:18 – Pas n'importe lequel, si je peux me dire.
26:21 En fait, c'est assez fascinant, parce que le terme « Munich » revient en boucle
26:25 dans la politique occidentale depuis, enfin, je dirais depuis 1945,
26:28 mais depuis une trentaine d'années, ça devient une référence obligée
26:32 pour décrire la lâcheté de certains devant la possible,
26:35 le nécessaire combat contre une tyrannie.
26:37 Et c'est presque devenu un mythe, mais avant de connaître ce mythe,
26:40 on y reviendra sur le mythe, peut-être revenir sur les événements historiques,
26:44 donc sur la réalité des choses, puis le mythe,
26:46 puis comment tout cela nous permet de comprendre les temps présents.
26:49 Bonsoir. – Bonsoir Mathieu.
26:51 – Alors, question première, on arrivera au mythe « Munich » bientôt,
26:54 mais tout simplement, d'abord et avant tout, pour le commun des mortels,
26:58 qui connaît le mot, qui connaît vaguement la référence,
27:00 mais qui a perdu le souvenir de la chose,
27:02 si vous pouviez résumer de quelques formules, d'un paragraphe,
27:05 ce qui s'est passé à Munich et pourquoi c'est d'une importance historique majeure,
27:08 comment le feriez-vous ?
27:09 – Eh bien, je pense que Munich est certainement une plaque tournante
27:14 de l'après-guerre, de l'après-grande guerre,
27:17 qui devient l'avant-guerre et très rapidement l'avant-nouvelle guerre mondiale.
27:22 Cela dit, il me semble qu'un lieu commun qu'il faut essayer,
27:28 que j'ai essayé dans la mesure de mes modestes moyens de contribuer à dissiper,
27:33 est celui de considérer que Munich est déjà le gouffre, est déjà la possibilité.
27:40 Non, Munich était en accord en soi, d'ailleurs écrit d'une façon tout à fait bâclée,
27:47 je pense qu'un étudiant de troisième année de droit public l'écrirait mieux,
27:52 mais c'est la preuve de la hâte dans laquelle on l'avait rédigé
27:56 dans la journée et dans la nuit du 29 septembre.
28:01 Mais cet accord signifiait au fond quoi ?
28:06 Signifiait la occupation, "Beseitzung", c'est le terme allemand qui est employé,
28:12 des Sudètes de la part de l'Allemagne nazie,
28:16 mais ne signifiait pas nécessairement, comme on l'a dit, la fin d'une Tchécoslovaquie,
28:23 même amputée, même diminuée.
28:26 C'est la raison pour laquelle j'ai voulu consacrer un chapitre à l'après-Munich,
28:32 qui vraiment prépare les événements de la guerre qui vont vers d'abord le protectorat de Bohémoravie
28:39 et puis la nouvelle menace sur la Pologne.
28:41 Alors, nous sommes en 1938, on sent la guerre possible,
28:46 on sent la guerre presque inévitable, et pourtant on cherche,
28:50 appelons ça le parti municois en temps réel,
28:52 parce qu'aujourd'hui, "municois", c'est devenu une insulte,
28:54 mais en temps réel, certains se disent, il est encore possible d'empêcher la guerre,
28:59 de la cournir, ou de se donner quelques années pour être plus fort lorsqu'elle viendra ?
29:03 Oui, alors la notion de parti municois est très vaste,
29:08 parce que je préfère d'une certaine mesure celle d'apaisement.
29:11 Les apaisants se convaincu que malgré toutes les preuves de traîtrise et de mensonge
29:18 qu'Hitler a donné à partir, disons de 1934-1935, quand il se sent un peu plus fort,
29:25 le plébiscite de la Sars, la Réunanie, la circonscription militaire obligatoire,
29:31 le plan quadriennal industriel qui est déjà dirigé vers la guerre,
29:35 la sortie de la Société des Nations et de la Conférence du désarmement,
29:41 malgré tout cela, on se dit qu'on peut encore composer à Hitler,
29:46 et son bluff magistral réussi, malheureusement, vis-à-vis des démocraties,
29:54 aussi bien des gouvernements des démocraties majeures, le Royaume-Uni et la France,
29:59 que des opinions publiques, est de faire croire, d'une part,
30:03 qu'il y a un droit de regard de l'Allemagne, nazie en l'occurrence,
30:09 sur les germanophones des Sudètes qui n'ont jamais été allemands, historiquement,
30:14 et d'autre part, que si on ne permet pas à l'Allemagne de réincorporer
30:21 ces "Auslandsdeutsche", ces Allemands de l'étranger,
30:24 après qu'on a incorporé l'"Auslandsdeutsche" de l'Anschluss autrichien,
30:30 quelques mois plus tôt, eh bien, il va faire la guerre.
30:33 Guerre qu'il n'a absolument pas les moyens de faire à ce moment-là.
30:38 Donc, un double bluff magistral, mais qui nous prouve, encore une fois,
30:43 que la psychologie est un facteur déterminant de la géostratégie.
30:48 - Et vous y arrivez, et vous commencez l'ouvrage avec un chapitre assez dense,
30:53 vous faites le portrait des principaux protagonistes,
30:56 et vous réintégrez, et j'ai trouvé ça tout à fait passionnant,
30:59 vous faites l'étude des tempéraments, l'étude des psychologies
31:03 dans la politique internationale.
31:05 On a aujourd'hui une approche très systémique, souvent,
31:08 et vous nous rappelez que la diplomatie, c'est d'abord une affaire d'hommes
31:11 capables de comprendre d'autres hommes.
31:13 Et vous faites totalement le passage entre Chamberlain et Churchill.
31:16 Vous êtes un peu durs avec Churchill, peut-être?
31:18 Vous dites que Chamberlain n'était pas capable de comprendre
31:21 la psychologie d'Hitler, c'était extérieur à son univers mental,
31:25 donc il ne lui était aucunement sympathique,
31:27 et il ne venait pas à comprendre l'ampleur démoniaque d'Hitler.
31:31 - Oui, alors, la question de Chamberlain et de Churchill
31:35 est une question qui se prolonge dans l'après-guerre,
31:37 notamment avec les mémoires de Churchill,
31:39 qui sont évidemment très dures vis-à-vis de Chamberlain.
31:43 Je pense que Churchill, lui, avait compris cette dimension
31:47 de l'hitlérisme, ce jusqu'aboutisme, c'est-à-dire ce fait
31:51 de ne pas s'arrêter à quelques résultats,
31:55 mais toujours obtenir plus.
31:58 Même la Pologne est un bluff.
32:00 En 1939, Hitler ne veut pas la guerre contre les États-Unis,
32:04 la France, mais les États-Unis... Pardon, le Royaume-Uni.
32:08 Et il est convaincu que le Royaume-Uni va à nouveau céder.
32:12 Et c'est quelque chose qui se pose dans les quelques heures
32:16 de fin août, début septembre 1939.
32:20 Mais ce n'est pas notre sujet de ce soir.
32:22 Mais simplement pour dire la force du bluff et la diplomatie du bluff.
32:26 À côté de cela, Churchill est bien content de ne pas être
32:29 à la place de Chamberlain. Voilà la situation.
32:32 Parce que lui, il a compris cette dimension.
32:34 Mais l'opinion publique anglaise, non.
32:37 Alors, les hommes dans les démocraties, les femmes et les hommes,
32:41 donc Chamberlain en Angleterre, Daladier en France,
32:44 sont quand même porteurs du sentiment de leur électorat
32:49 et de leur opinion publique, qui dans le cas de l'apaisement,
32:53 ce qu'on a un peu simplifié par "muniquois", "esprit muniquois",
32:58 est beaucoup plus vaste même que leur électorat.
33:02 Il suffit de voir la séquence du retour de l'un et de l'autre de Munich,
33:07 avec même la surprise que cela provoque chez Daladier
33:12 et le mot gaulois qu'on lui prête en voyant la foule enthousiaste
33:16 qu'il accueille. Arthur de Matrigot.
33:19 - Déjà, je voudrais vous remercier parce que c'est un livre passionnant
33:21 et je pense que ce sera un merveilleux cadeau à offrir à madame Ayé
33:24 pour les prochains débats. Et puis, il faut quand même le dire,
33:27 Perrin font quand même des super livres d'histoire.
33:29 A chaque fois que vous recevez des invités, Mathieu de Perrin,
33:31 c'est toujours passionnant. Vous parlez donc de Munich.
33:34 On a Daladier, Chamberlain, Hitler, Mussolini.
33:37 On apprend un truc dans votre livre, en tout cas moi j'ai appris ça,
33:39 c'est que Chamberlain et Daladier ne se sont pas concertés,
33:41 ne se sont pas parlé avant, il n'y avait pas de front commun.
33:43 Comment expliquer ça ? Est-ce que les deux étaient sur la même ligne ?
33:46 Est-ce que les deux avaient les mêmes objectifs ?
33:47 Comment expliquer ce... En tout cas, rétrospectivement, on est assez surpris.
33:51 - Oui, mais il y a des... La position commune, si vous voulez,
33:56 est simplement le fait d'être les deux grandes démocraties de l'Europe.
34:01 Mais après cela, tout est différent parce que les Anglais
34:08 n'ont pas un engagement précis envers la Tchécoslovaquie.
34:13 Ils ont des engagements dans le cadre pan-européen,
34:16 des ententes de Locarno de 1925, mais enfin,
34:19 ce ne sont pas des engagements aussi précis que ceux de la France,
34:23 qui non seulement est le pays qui a porté la Tchécoslovaquie en 1918-19
34:29 sur les fronts baptismaux de la Conférence de la Paix,
34:33 mais a également signé avec la Tchécoslovaquie un accord
34:37 qui est un traité d'alliance et d'amitié en 1924,
34:41 traité d'alliance et d'amitié qui implique que si l'un des deux partenaires
34:46 est attaqué, l'autre viendra à son secours.
34:48 Donc, on a essayé de réduire la voilure de cet engagement,
34:53 c'est assez technique, en disant qu'il n'y avait pas un protocole militaire.
34:57 Non, le traité est un traité fort.
35:00 Et c'est la raison pour laquelle Daladier se cache un peu,
35:03 si vous voulez, derrière les Anglais, qui sont les porteurs de la ligne
35:10 de l'apaisement, que d'ailleurs Chamberlain n'a pas inventée.
35:14 Son tort face à l'histoire est de ne pas avoir considéré
35:19 cette dimension de l'hitlérisme qu'on ne pouvait apaiser
35:24 par des concessions, même en Europe centrale.
35:28 À côté de cela, il y a également un autre lieu commun,
35:33 qui est celui sur lequel ils ont la même attitude vis-à-vis
35:41 de l'Allemagne au moment de Munich.
35:44 Ce n'est pas vrai parce qu'une des raisons pour lesquelles
35:47 ils arrivent séparément et ne se concertent pas,
35:51 c'est que Chamberlain a quelque chose dans sa poche
35:55 qu'il intéresse beaucoup plus que l'accord de Munich,
36:00 que les Français appellent les accords de Munich.
36:03 L'accord de Munich, qui d'ailleurs ne fait qu'acter et faire signer
36:07 sur le papier quelque chose qu'on a déjà approuvé dans les heures précédentes,
36:11 y compris les malheureux tchèques, c'est-à-dire l'amputation des Sudènes.
36:15 C'est la raison pour laquelle l'accord de Munich se fait
36:18 dans la première demi-heure.
36:21 Mais ce qui apporte aux Anglais, c'est ce que Hitler appellera
36:28 l'énième chiffon de papier, "paix en notre temps".
36:31 Le bref accord qui est l'accord anglo-allemand,
36:37 que Chamberlain agitera à la foule en revenant à Londres,
36:41 et qui est l'accord qu'il ne veut pas présenter aux Français,
36:45 parce qu'il veut le limiter à un engagement de paix,
36:50 donc de non-guerre entre l'Angleterre et l'Allemagne,
36:54 car il s'inquiète que les Allemands aient des revendications vers la France,
36:59 et ils en ont évidemment, l'Alsace-Lorraine, pour tout dire,
37:03 et la frontière d'Iran, sur laquelle il ne veut pas engager le gouvernement anglais.
37:08 Donc cela prouve à quel point les deux démocraties
37:11 sont vraiment sur deux positions bien différentes.
37:14 - Alors, vous nous dites dans votre ouvrage, et plusieurs ont déjà fait ce constat,
37:18 qu'on aurait pu savoir d'avance ce qu'Hitler voulait faire,
37:22 parce qu'il l'avait écrit.
37:24 C'est un homme sans mystère en la matière,
37:27 il dit "voilà ce que je veux faire, voilà jusqu'où j'irai".
37:29 Alors, je vous pose la question sur le plan de la psychologie des hommes démocratiques.
37:32 Comment comprendre le fait que les hommes démocratiques, en leur temps,
37:35 n'aient pas compris la nature de l'hitlérisme ?
37:38 Certains l'ont compris, mais globalement,
37:40 on peine à comprendre la nature de cette entreprise, de cette idéologie.
37:43 - Il y aurait un magnifique essai pour vous à écrire sur ce sujet.
37:47 Dans la première partie de l'émission, vous parliez de Mein Kampf,
37:51 qu'on trouve très facilement dans certains pays,
37:56 mais on le trouvait également en Europe.
37:59 L'État-major français, par exemple, a fait une traduction,
38:04 le deuxième bureau pour l'État-major,
38:09 de chapitres importants concernant la France.
38:13 Donc, les spécialistes, au moins, avaient la possibilité de le lire.
38:17 Et le fait qu'un dictateur, et quel dictateur,
38:20 ait mis noir sur blanc sur tous ces projets, pratiquement tous,
38:24 en considérant les Slaves, sa deuxième proie,
38:28 après les Juifs qui, en plus, de son point de vue, n'avaient même pas de patrie,
38:32 alors qu'il fallait récupérer la patrie, le territoire que les Slaves occupaient.
38:37 Ça, c'est de l'immense et néfaste démagogie.
38:40 Ça a pris sur les gens.
38:42 La seule justification, si vous voulez,
38:45 et l'historien doit le dire avec beaucoup de prudence,
38:48 qu'on puisse trouver sur cette non-lecture ou non-compréhension diffuse,
38:53 est le fait de se dire qu'il y a une différence entre un marginal forcené
39:00 qui écrit cela à un moment où, finalement, il ne représente rien politiquement,
39:08 même sur l'échiquier de ce qu'était l'Allemagne weimarienne des années 1920,
39:13 et un homme d'État qui, par définition,
39:17 pour le simple fait d'arriver au pouvoir et d'un État important,
39:22 doit s'assagir, et peut-être, ce qu'il disait alors n'est pas ce qu'il veut aujourd'hui.
39:28 Triste explication vis-à-vis de tout ce qui se passe,
39:31 je le répète après peut-être les premières deux années d'ambiguïté 33-34,
39:36 mais dès 35, c'est très clair.
39:38 - Alors, on se rapproche peu à peu de Munich comme symbole,
39:41 c'est-à-dire comment Munich s'est autonomisé.
39:43 Alain Finkielkraut, dans un très beau livre, L'ingratitude, revient sur Munich.
39:47 On est en 1999, et il dit que Munich, du point de vue généralement entendu,
39:51 c'est la faiblesse devant la tyrannie, on le sait,
39:53 mais il dit que c'est autre chose aussi.
39:55 C'est intéressant, évidemment, la Tchécoslovaquie.
39:57 C'est une petite nation qui découvre qu'elles ne sont pas maîtresses de leur destin,
40:00 que de grands empires, que de grandes puissances
40:02 peuvent décider d'amputer un bout de pays, d'amputer un bout de population,
40:06 de décider finalement que leur souveraineté est secondaire,
40:09 que du point de vue des petites nations,
40:11 Munich, c'est un rappel en fait qu'elles ne comptent pas dans les grands calculs géopolitiques.
40:15 Est-ce que vous diriez la même chose?
40:17 - Oui, mais c'est un problème qui naît avec les traités de paix de la Grande Guerre,
40:21 parce que les traités de paix de la Grande Guerre,
40:23 après la destruction ou la dissolution,
40:26 on peut s'interroger sur le terme propre,
40:30 de l'Autriche-Hongrie, ne parlons pas de l'Empire Ottoman,
40:34 de l'Empire Allemand et de l'Empire Russe,
40:37 a provoqué cette situation,
40:40 notamment en Europe centrale, danubienne et orientale,
40:45 que nous retrouverons après la guerre,
40:49 après la Nouvelle Guerre mondiale, en 1945,
40:53 dans l'après 1945, Staline, d'une certaine mesure,
40:56 remplaçant Hitler dans les plans de conquête de l'Europe centrale,
40:59 mais là encore, les petites nations,
41:02 brièvement revenues à la démocratie,
41:05 comme c'est le cas de la Troisième République tchécoslovaque,
41:08 la République de 1945-1948,
41:11 retour de Bénès, grand espoir qu'il y ait à ce moment-là, au moins ce pays.
41:16 L'Autriche s'est sauvée parce qu'elle était la pièce d'échange
41:20 avec l'équilibre de l'autre côté du rideau de fer,
41:26 mais la Pologne, la Tchéquie, la Tchécoslovaquie ont été broyées,
41:30 et de nouvelles glaciations jusqu'à 1989-1990.
41:34 - Arthur de La Triguerre.
41:35 - Justement, vous écrivez même que, comme Mathieu l'a dit,
41:37 les grands décident pour les petits,
41:39 en faisant référence à la conférence de Yalta.
41:42 Quelle comparaison on peut faire justement entre Yalta et Munich ?
41:45 Alors, ce n'était pas Chamberlain, c'était Churchill.
41:47 La Tchéquie, il ne la concède pas à Hitler, mais à nos dictateurs, Staline.
41:51 Est-ce qu'on peut mettre sur le même plan,
41:53 où il y a quand même des choses vraiment différentes ?
41:55 - Le sacrifice des petites nations.
41:57 - Les comparaisons sont toujours difficiles et mal aisées,
42:00 et Munich, et certainement ce que nous interprétons par Munich,
42:04 et l'après-Munich, est un plan de conquête.
42:08 On peut considérer qu'après 1945,
42:11 Staline ayant donné ses preuves de collaboration avec les Occidentaux,
42:16 d'ailleurs considérable,
42:18 parce que le front oriental joue pour la stratégie militaire.
42:22 Vous savez, tout le débat sur la tardive ouverture du deuxième front européen
42:27 que demande Staline et que ne lui accordent pas les Occidentaux.
42:30 Donc, il y a quand même une participation importante
42:33 à ce qu'on peut appeler alors la lutte contre le nazisme,
42:38 les dictatures, et tout cela.
42:42 Cela peut avoir justifié d'une certaine mesure
42:46 une relative négligence occidentale
42:52 vis-à-vis de ce qu'est la situation
42:55 qu'on aurait trouvée dans les nouvelles démocraties populaires.
43:02 Je pense que dès les premiers procès contre les dirigeants,
43:07 qui étaient souvent des dirigeants communistes,
43:09 mais non considérés comme totalement alignés sur la page stalinienne,
43:16 on a compris qu'on avait fait un énorme vide à l'intérieur de l'Europe
43:21 et qu'on l'avait vraiment divisée,
43:23 et que les responsabilités occidentales anglo-américaines
43:27 dans la division de l'Europe sont au moins aussi importantes
43:30 que les responsabilités de Staline et de l'Union soviétique.
43:34 Alors, Munich aujourd'hui.
43:36 Je suis là en 1980 et j'ai l'impression que le thème de Munich
43:39 est revenu la première fois au début de la première guerre du Golfe,
43:42 quand ceux qui disaient « est-ce que c'est une bonne idée de suivre les Américains ?
43:45 Est-ce qu'on devrait avoir des réserves ? »
43:46 disaient « attention, esprit muniquois ».
43:48 En 2003 aussi, au moment de l'intervention américaine en Irak,
43:53 « esprit muniquois ».
43:54 Au moment des guerres yougoslaves, est-ce qu'on doit intervenir ou non ?
43:58 La référence à Munich a été utilisée.
44:00 Aujourd'hui, en Ukraine, c'est utilisé encore une fois.
44:03 Alors, je vous poserai la question, et on arrivera au contemporain bientôt,
44:06 mais est-ce qu'il y a un usage légitime de la référence à Munich
44:10 pour penser le monde contemporain ?
44:12 C'est un peu difficile de répondre parce que, personnellement,
44:16 j'aurais plutôt tendance à réduire les définitions à leur contexte immédiat.
44:24 Donc, j'ai un peu du mal à suivre ce débordement,
44:28 si vous voulez, que le terme a eu.
44:30 Et je répète, pour moi, Munich n'est pas nécessairement
44:34 le pire moment de la démission et de la reddition aux dictatures.
44:39 C'est d'ailleurs un dictateur, il y a encore un lieu commun,
44:43 permettez-moi de revenir un instant avant de passer à l'actualité,
44:46 qui est Mussolini, qui est le médiateur et qui n'est pas du tout aligné,
44:51 contrairement à ce qu'ont affirmé certains auteurs,
44:53 ce n'est pas en tout cas mon avis, sur les positions hitlériennes.
44:56 Il ne veut pas, après l'enchlous, surtout pas d'un débordement hitlérien
45:01 en Europe centrale, vers la frontière du Brenner.
45:05 Et il sort avec ce compromis de l'accord qui prévoit un stratagème
45:12 qui a été loyauté après par les Allemands,
45:16 mais avec le concours passif des Anglais et des Français,
45:20 qui était la Conférence internationale, la Commission internationale.
45:23 La Commission internationale devait définir quand même les frontières
45:26 de la nouvelle Tchécoslovaquie.
45:28 C'est un peu technique, on l'a un peu oublié, mais tout simplement pour dire
45:32 que Munich n'est pas en soi nécessairement la plus grande démission de cette époque.
45:39 Mais l'esprit municois est certainement un esprit sur lequel,
45:43 surtout dans des pays comme la France et l'Angleterre,
45:47 mais également il y a un esprit municois, si l'on veut, en Allemagne,
45:51 derrière la dictature.
45:53 Et c'est l'idée d'éviter la guerre à tout prix,
45:56 et d'éviter la guerre pour un pays lointain, comme l'appelle Chamberlain,
46:01 qui n'était pas lointain du tout, d'ailleurs, qui était au cœur de l'Europe,
46:05 et qui paraît un enjeu vraiment mineur par rapport à tout le reste.
46:10 Et de démission en démission, on arrivera à ce qu'on a vu.
46:13 Voilà, alors la formule en soi, j'ai un peu de difficulté
46:17 à l'appliquer trop fréquemment dans tous les cas.
46:21 Appliquons plutôt sur celle de démocratie vigilante,
46:25 de démocratie forte, et de démocratie qui connaissent,
46:29 là il faut quand même passer à l'usage légitime de la force,
46:33 par la panoplie d'instruments que la communauté internationale
46:38 s'est donnée dans le deuxième après-guerre.
46:40 - Arthaud de Vatrigan.
46:42 - Justement, vous dites, pour revenir sur Munich,
46:44 si on avait eu deux goulets de Churchill à la place de Chamberlain,
46:46 il n'y aurait pas eu ça.
46:48 C'est ce que certains disent.
46:49 Et vous, vous répondez, quand les démocraties s'affadissent,
46:52 pourquoi leurs dirigeants devraient-ils agir différemment ?
46:54 Elles ont toujours ce qu'elles méritent.
46:56 Donc plutôt que les comparaisons de stratégie, de camp et de géopolitique,
47:00 ce qui serait peut-être plus intéressant,
47:01 ce sont les comparaisons de l'esprit des peuples,
47:04 l'esprit, l'humeur, et peut-être la situation.
47:07 Alors, quelle était la situation, par exemple, de la France en 1938,
47:10 et est-ce qu'on peut la comparer à celle de la France aujourd'hui ?
47:14 - Écoutez, la France en 1938, c'est la raison pour laquelle l'Ukrainie
47:18 de dire, évidemment, Churchill et de Gaulle,
47:23 imaginons ce film en tant que personnalité,
47:26 parce que les personnalités interviennent.
47:28 L'histoire marche sur les jambes des femmes et des hommes,
47:31 donc les personnalités jouent un rôle.
47:33 Aurait fait toute autre impression, mais ce n'était pas leur moment.
47:37 D'ailleurs, dans le cas de Churchill, et peut-être dans celui de de Gaulle,
47:41 sans la guerre, serait-il arrivé au pouvoir ?
47:44 Churchill avait le même âge de Chamberlain,
47:46 c'était un homme qui était passé par tous les travers et tous les traversers du désert.
47:52 Et toutes les erreurs qu'il avait faites dans la Grande Guerre,
47:55 c'était un homme politique au bout de rouleaux.
47:57 Mais enfin, ça, c'est, si vous voulez, relativement secondaire.
48:01 Ce qui compte, c'est votre question, c'est-à-dire l'état d'esprit général.
48:05 Alors cet état de démission, cet état qui glisse de ce que nous pourrions appeler un pacifisme vertueux,
48:14 c'est-à-dire nos pays ont connu et saigné immense pendant la Grande Guerre,
48:20 dont la mémoire, 20 ans plus tard, est encore bien présente.
48:25 Toutes les familles pleurent, ou presque, pleurent encore des victimes proches ou moins proches,
48:32 mais quand même, c'est une réalité, plus de guerre jamais.
48:36 Ce qui est, encore dans les années 1920, un appel vertueux
48:41 qui porte justement à cette réconciliation pan-européenne des accords de Locarno,
48:46 qui est, disons, la lune de miel du pacifisme vertueux.
48:51 Mais puis, elle glisse vers un pacifisme de l'intérêt,
48:55 un pacifisme plus, si vous voulez, provincial, je ne dirais pas souverainiste,
49:00 qui est l'idée de dire pas de guerre sur mon territoire, à moi,
49:04 pas de guerre dans mon village, pas de guerre dans mon jardin.
49:08 Et alors, vous voyez comment ce qui est un idéal qui peut rassembler les peuples
49:15 devient un idéal essentiellement de survie d'une communauté, voire d'un groupe d'individus.
49:22 Et c'est ce qu'interprète, hélas, ce pacifisme de la fin des années 1930,
49:31 qui est d'une part basé sur l'aveuglement,
49:34 qu'on va pouvoir donner à Hitler ce qu'il veut et ne demandera rien d'autre,
49:39 et chaque fois, il en demande un peu plus,
49:41 et d'autre part, l'idée que ce sont les autres qui feront la guerre, nous, on reste chez nous.
49:47 C'est la raison pour laquelle Daladier et Chamberlain, quoi qu'on en dise,
49:53 partagent leurs responsabilités avec celles de leurs opinions publiques et de leur électorat.
49:59 Alors, vous refusez, avec raison évidemment, de plaquer le passé sur le présent,
50:03 le présent sur le passé, mais vous ne vous interdisez pas,
50:06 dans la dernière page de votre ouvrage, une réflexion,
50:09 vous prolongez donc votre travail jusqu'au temps présent,
50:12 en référant exactement, directement, à la crise ukrainienne des temps présents.
50:16 Alors, je vous poserai la question ici,
50:18 est-ce que l'Ukraine aujourd'hui, c'est la Tchécoslovaquie d'hier, dans votre esprit ?
50:21 Ce lointain pays qu'on connaît à peine.
50:24 Oui, alors, on ne peut pas faire la comparaison dans la mesure,
50:27 enfin, si nous voulons rester strictement, mais je n'innocente rien,
50:31 je ne veux pas être mal interprété pour ce que je dis,
50:33 mais je dis simplement que l'Ukraine,
50:35 quoiqu'ayant une noble et millénaire histoire nationale,
50:39 a quand même été incorporée à l'Union soviétique,
50:42 de plus, même après une guerre civile, dans la guerre civile,
50:46 de la fin des années 19, années 20, 21,
50:53 mais en faisait partie, donc il y a une psychologie différente
50:58 par rapport au Sud-Est qui n'avait jamais fait partie de l'Allemagne historique,
51:03 à aucun moment de l'Allemagne,
51:05 ce qui a porté, même, à un phénomène qui est un drame dans le drame,
51:11 celui de la mixité, c'est-à-dire celui du fait qu'il y a un nombre considérable
51:17 de familles qui ont été départagées à nouveau par cette guerre,
51:25 alors que depuis des générations, peut-être, on les avait réunies.
51:29 Donc, il me semble qu'il faut approcher la question
51:33 avec une extrême circonspection et essayer tous les moyens
51:38 qui sont quand même disponibles pour réduire la voilure du conflit
51:44 et non pour l'augmenter.
51:46 - Ah, mais c'est très important, ce que vous dites ici,
51:48 parce que la tentation, on en sait plusieurs,
51:50 c'est la rationalisation du conflit.
51:52 Si je comprends bien votre propos, mais j'ai tellement le compris,
51:55 vous nous dites qu'il faut éviter qu'un conflit local ne se régionalise
51:59 et ne devienne ensuite international.
52:02 Ce qui est le contraire, si je peux me permettre de la lecture
52:05 de la Chèque-Austhavaque et ensuite de l'Europe centrale
52:09 au moment de la Deuxième Guerre mondiale.
52:11 - Oui, mais parce que là, nous avons des caractères
52:14 qui sont des caractères spécifiques de cette situation,
52:18 nous devons intervenir sur ces caractères spécifiques
52:21 et nous devons faire en sorte, dans la mesure du possible,
52:25 parce qu'évidemment, si nous l'avions fait avant le début du conflit,
52:28 et je pense que nous ne l'avons pas vraiment bien fait,
52:31 nous aurions pu réduire les chances du conflit.
52:34 Mais en tant que nous y sommes, nous devons nous rendre compte
52:38 de la nécessité de réduire le périmètre de la tension
52:44 au lieu de l'augmenter.
52:47 - Il nous reste environ trois minutes, je me permettrai,
52:50 si j'ai une question, à la suite d'Arthur, sur l'esprit démocratique.
52:53 On dit quelquefois, les peuples démocratiques, c'est un peu Roosevelt,
52:56 il avait cette réflexion d'ailleurs, ne veulent pas la guerre,
52:59 redoutent la guerre, mais une fois qu'ils basculent
53:01 sur la logique de la guerre, ils s'y convertissent
53:03 et peuvent aller jusqu'à la guerre totale à leur manière.
53:06 Est-ce qu'avec votre étude de l'esprit démocratique au moment de Munich,
53:10 partagez-vous cette analyse ?
53:12 - C'est en tout cas, certainement, la vocation des États-Unis.
53:16 L'isolationnisme, le refus, et puis l'engagement devient un engagement total.
53:22 Vous savez, je pense que la guerre, malheureusement, quoi qu'on en dise,
53:26 fait partie de la panoplie des instruments géostratégiques
53:29 et elle en fera toujours partie.
53:31 Il s'agit évidemment de faire un usage prudent
53:35 de ce qui pourrait conduire à la guerre, vu simplement et surtout
53:39 du point de vue de ce qu'est la légitimité internationale qu'elle peut avoir.
53:44 Sinon, c'est du terrorisme, même à niveau d'État.
53:48 - Vous faites référence aux États-Unis, la tentation de la guerre totale
53:51 qu'ils peuvent connaître lorsqu'ils s'y convertissent.
53:53 Est-ce qu'il y a, en comparaison avec les Européens,
53:56 un esprit européen de la guerre limitée ?
53:58 Ça a déjà existé. Est-ce que ça existe encore aujourd'hui ?
54:01 - J'espère que non, mais je pense que...
54:03 - De la guerre limitée, j'entends une guerre que l'on sait encadrer
54:06 pour éviter que la guerre totale...
54:08 - Non, malheureusement, les exemples récents ne sont pas à l'avantage des Européens.
54:12 Vous voyez les dégâts que nous avons faits dans les conflits dans la ex-Yougoslavie.
54:17 - Qu'est-ce que vous avez hanté dans les enfants ?
54:19 - Eh bien, je dis simplement que nous avons été très souvent la remarque des États-Unis
54:23 et nous n'avons pas donné cette dimension européenne que nous pouvions donner
54:27 dans un pays qui était aussi proche de nous que la Tchécoslovaquie,
54:30 dont nous connaissions beaucoup et très bien l'histoire,
54:33 beaucoup mieux que les États-Unis,
54:35 et nous aurions pu avoir une vocation plus forte à la négociation.
54:39 - Et la dernière question pour Arsene Vatrigan ?
54:41 Pensez-vous que la France soit devenue un petit pour qu'il est grand, décide aujourd'hui ?
54:45 - Non, je ne suis pas un historien italien de répondre à une question
54:49 qui concerne l'assiette internationale de la France.
54:55 Je pense que la France a une très grande dimension,
54:58 une très grande vocation culturelle d'abord,
55:00 qui par définition devient politique et stratégique.
55:03 Voilà, donc je pense qu'elle a toutes les possibilités et toutes les chances de se faire sentir.
55:08 - Un grand merci, Mauricio Serra.
55:10 Je rappelle votre ouvrage, "Munich 1938, la paix impossible aux éditions Perrin".
55:17 Mathieu Bocoté, Arthur de Vatrigan, à la semaine prochaine.
55:20 Le point sur l'information, c'est avec Sandra Tchionbo,
55:24 mais c'est dans un instant, et ensuite ce sera le point sur l'information avec vous.
55:28 merci à bientôt !